– Bonjour. Monsieur Nikolaï.
    La voix du robot ressemblait parfaitement à celle d'un humain bien que le ton qu'il employait soit un peu trop robotique.
  – Bonjour Mokka, fit le scientifique, un grand sourire sur le visage.
    Yann entra dans cette chambre – du moins ressemblait-elle à cela – qui était totalement blanche et ne possédait que peu de meubles, juste le strict minimum. Il posa finalement son regard sur l'expérience dont se vantait tant son patron.
  – Que... ?!
    Il fixait un... enfant. C'était étrange. Il semblait si humain, ce n'était sans doute pas l'expérience dont parlait Nikolaï. Il parcourut à nouveau du regard la pièce. Vide. Il n'y avait rien, sinon ce gamin. Ce n'était pas possible ! Il enrageait presque de ne pas trouver en quoi consistait l'expérience. Il avait parlé de mélanger la robotique et la biologie... peut-être des prothèses plus que réalistes ? Il avait déjà entendu parler de ce projet-là.
  – On m'explique... ?
   Un fin sourire se dessina sur le visage de Nikolaï.
 – Eh bien, vous l'avez devant vous ! Ne la voyez-vous pas, cette « expérience » que je tenais tant à vous montrer ? Mokka, ma création. Mon fils, si je peux l'appeler comme ça. C'est un Androïde. Je l'ai créé pour qu'il soit aussi proche que possible de l'être humain. Mokka possède un cœur et un cerveau humain ce qui fait de lui un Androïde tout à fait exceptionnel. C'est le tout premier modèle et il a encore quelques imperfections mais cela peut s'arranger. Dit-il tout en se mettant face à sa création. Disons qu'il est comme un grand enfant à qui on doit tout apprendre.
    Le scientifique était très attaché à cet Androïde et le considérait comme son propre fils, et cela se voyait.
  – ... Pardon ? Le nouveau venu cligna des yeux, observant minutieusement cet... androïde. C'était impossible, comment un robot pouvait-il être aussi humain ?! Quoi ?! Mais... Il fronça les sourcils. Il venait de comprendre. Ha ha. C'est très drôle. C'était quoi, une forme de bizutage moderne ? Bon, c'était bien marrant votre petite blague, on peut passer à quelque chose de plus sérieux maintenant ?
    Nikolaï se releva et prit un air très sérieux et grave, comme si la question que venait de poser Yann était une insulte.

 – Oh, mais je suis très sérieux. Pourquoi pensez-vous que ce projet est secret ? Il se tourna vers le robot. Mokka, salut mon nouvel assistant s'il-te-plaît. Son nom est Yann Skelton.
    À cet ordre le robot se leva et regardant le nouvel arrivant d'un air plutôt froid – puisqu'il ne pouvait avoir d'autre air que celui-là – il parla :
  – Nouvelles données....Enregistrement des données... ... ... Yann Skelton... ... Assistant de Monsieur Nikolaï... ... Enregistrement terminé.- je m'appelle Mokka. Je suis le modèle 131.101. Un Androïde. Mon créateur est Monsieur Nikolaï ici présent. Enchanté de faire votre connaissance monsieur Skelton, assistant de monsieur Nikolaï.
    Yann resta sans voix, les bras ballant. Il était rare de le voir comme ça, et il fallait vraiment qu'il croise quelque chose de stupéfiant pour qu'il soit autant prit au dépourvu.

 – Putain...
    Il n'arrivait pas à y croire. Il était impossible de deviner qu'il s'agissait d'un robot à première vue. Il paraissait si vivant...
 – ...euh.... Il passa une main dans ses cheveux. En... Enchanté aussi Mokka.....
    Il s'adressa ensuite à Nikolaï, mais sans pour autant quitter du regard Mokka. Son instinct de scientifique reprenait le dessus sur la surprise :
  – Donc à partir de maintenant moi aussi je vais travailler sur ce projet ?
    Cette idée l'excitait au plus haut point. En même temps, qui ne serait pas enjoué à l'idée de travailler sur un projet top secret avec des humains-robots ? On aurait dit un film, mais en mieux. Il avait déjà plein d'expériences en tête à faire sur cet androïde !
    – Oui, vous aussi vous travaillerez sur ce projet. De plus si vous avez été pris comme assistant c'est également dû au fait que l'on m'a assigné à un autre projet tout aussi important et que donc je ne pourrai pas tout gérer tout seul. Je souhaiterai ou plutôt je voudrai que vous enseigniez à Mokka à être le plus humain possible... Je ne sais pas si vous me suivez...
    Il fit une légère pose, réfléchissant à un moyen de l'expliquer, car ce qu'il souhaitait faire de Mokka était difficilement comprit des autres scientifiques qui voyaient « l'objet » comme une chose que l'on pourrait employer comme une arme, ou bien quelque chose d'assez dangereux capable de remplacer l'être humain lui-même.

  – Je veux prouver qu'un robot auquel on a greffé un cerveau et un cœur peut avoir des sentiments humains : pleurer, rire... ces choses-là. Je sais que cela peut sembler un peu naïf mais Mokka a prouvé plusieurs fois qu'il pouvait manifester des sentiments, même si à première vue, il semble assez passif... Vous comprenez le sens de mes recherches ?
    Yann réfléchit un instant, afin d'être sûr de répondre ce qu'il fallait.

  – Bien sûr que je comprends, vous me prenez pour un idiot ? Bon... ça ne doit pas être si dur que ça, c'est ok...
    En réalité, il était vexé. Il devait jouer les baby-sitters ? Il aurait préféré faire quelque chose de mieux comme... le disséquer pour voir comment il fonctionnait, ou même le soumettre à tout plein de tests pour voir ses réactions !

  – Donc je m'occuperai seul de lui pendant que vous serrez ailleurs avec votre autre projet c'est ça ?
    Voilà qui n'était pas si mal. Il pourrait tout de même essayer deux-trois trucs sur lui...
    – C'est génial, j'ai hâte de commencer !
    – Bien...bien... J'espère donc que vous ne ferez rien de contrariant pour Mokka pendant mon absence.
    Le regard qu'il lançait à Yann était presque menaçant. Beaucoup l'accusait d'être trop attaché à l'Androïde et que le fait de lui avoir donné un prénom en était la preuve. C'était une des raisons aussi pour laquelle un assistant ainsi qu'un autre projet lui avait été attribué. L'homme soupira et regarda sa montre.
    – Oh, je suis déjà en retard. Je suis au regret de vous dire que je dois vous laisser. Je reviendrai plus tard, en soirée sûrement. Je vous laisse avec Mokka. Oh, une dernière chose, j'avais des papiers et des cartes à vous donner mais je n'ai pas le temps, demandez à la secrétaire de vous les donner, elle saura sûrement où elles se trouvent puisqu'elle a accès à mon bureau. Et si vous vous perdez vous n'avez qu'à demander votre chemin, mais les recherches en ce qui concernent ce projet-ci se font surtout entre le 11ème et le 13ème étage. Sur-ce, je vous quitte et vous laisse faire plus ample connaissance avec Mokka. Il se tourna vers celui-ci et s'adressa à lui. Je te laisse avec mon assistant...
    – Vous partez ? demanda-t-il en penchant sa tête sur le côté. Il semblait prendre un air légèrement triste.
    – Oui, mais je reviens vite. Il lui fit un sourire avant de lui tapoter la tête. Yann Skelton va s'occuper de toi pendant mon absence. Il se retourna ensuite et s'éclaircit la voix. Enfin bref, je pars donc. Avez-vous des questions à me poser avant ?
    Cet homme paraissait vraiment très attaché à l'androïde, c'était une certitude. À chaque fois qu'il parlait de Mokka, sa voix semblait devenir plus douce et plus chaleureuse, comme un père parlant fièrement de son fils. Oui, c'était exactement ça. Un père et son fils... C'était tellement mignon... Yann détestait ce qui était mignon.
 – Aucune question à part : vous savez quel bonnet fait la secrétaire ?
    Nikolaï soupira d'exaspération, ce genre d'attitudes était pour lui franchement énervantes et cela se voyait sûrement à l'expression de son visage.
    – Je ne sais pas, vous n'avez qu'à lui demander vous-même, elle vous répondra peut-être avec un peu de chance. Sur ce... il jeta un rapide coup d'œil à sa montre... Il allait se faire remonter les bretelles c'était certain. Je vous laisse.
    Le scientifique sortit en adressant un dernier regard à Mokka puis un salut poli au nouveau venu.
    - Au revoir Nikolaï ! répondit Yann avec un sourire radieux.
    Mais à peine l'homme fut-il sortit de la pièce que Yann se tourna vers Mokka en perdant immédiatement son sourire. Par quoi allait-il commencer ? Et surtout, comment allait-il faire pour réaliser une expérience entre deux séances d'humanisation ? Il allait falloir être discret.